07 Octobre 2019

SolPhyLy : Evaluation du devenir des produits phytopharmaceutiques en plein champ en fonction des pratiques culturales

Comment les pratiques culturales affectent l’état des masses d’eaux souterraines ? Quelles alternatives au glyphosate ? Une approche expérimentale de plein champ permet d’apporter des réponses grâce au projet SolPhyLy.

La gestion de la ressource en eau souterraine et de sa contamination est un enjeu important pour un approvisionnement en eau potable de bonne qualité. En effet, la contamination des eaux souterraines n’étant visible qu’après de nombreuses années, il est nécessaire d’anticiper le flux de produits de protection des plantes (PPP) pouvant les atteindre. Dans ce but, et depuis 2006, les concentrations maximales admissibles en pesticides dans les eaux souterraines sont les mêmes que celles fixées pour l’eau potable, c’est-à-dire 100 ng.L-1 par substance et 500 ng.L-1 pour le total des substances.

 

L’originalité du projet SolPhyLy repose sur l’utilisation de lysimètres qui sont, dans notre cas, des cylindres en inox de 1,5 m de hauteur et 1 m de diamètre remplis de sol, enfouis à 50 cm de profondeur dans des parcelles agricoles et permettant de récupérer l’eau qui percole à travers à 2 m de profondeur. Ceci permet de connaître les flux de pesticides transitant dans le sol et atteignant les eaux souterraines. En effet, il est considéré qu’après 1 m de profondeur les molécules ne sont plus dégradées par les sols et atteignent donc les eaux souterraines à plus ou moins brève échéance.

 

Le projet contribue ainsi à une meilleure compréhension de la dégradation des PPP dans le sol, en conditions réelles de plein champ et dans diverses configurations de pratiques culturales (labour ou non, restitution des résidus de culture ou non), ainsi que des flux vers les eaux souterraines.  Il permet également de proposer des alternatives à l’utilisation du glyphosate.

 

SolPhyLy est un projet de six ans qui a débuté au cours de la saison 2018-2019 et s’est terminé en septembre2024.

Les résultats obtenus illustrent :

  • la diversité des comportements tant de persistance dans le sol que de lixiviation ;
  • la qualité de l’analyse de sol en tant qu’indicateur d’usage d’une matière active et
  • la pertinence et la performance du dispositif dans l’évaluation des flux de matières actives vers les eaux souterraines.

 

Dans le sol, certaines matières actives sont très persistantes.  Il s’agit essentiellement de fongicides (y compris les SDHI). 

Des herbicides tels que l’aclonifen sont encore présents dans le sol plusieurs années après l’apport.  La clomazone présente également une rémanence importante dans le sol.

La plateforme expérimentale Sol Résidus de Gembloux Agro-Bio Tech a permis d’avoir un regard sur l’impact du mode de gestion (et plus particulièrement du travail du sol et de l’enfouissement ou exportation des pailles) sur le devenir des PPP dans le sol.  A ce stade, un léger impact du travail du sol est visible : un travail superficiel du sol (et non labour) présente des concentrations en PPP légèrement inférieures à la modalité « labour ».

 

Les lysimètres permettent d’évaluer les flux et concentrations de PPP et leurs éventuels métabolites vers les eaux souterraines.  Les observations étant réalisées à deux mètres de profondeur, ils servent d’outil d’aide à la décision pour l’utilisation des PPP (limitation d’un usage pluriannuel) et leur suivi dans les eaux souterraines.

Ainsi, dans l’eau, ce sont principalement des herbicides (et leurs métabolites) qui retiennent l’attention.  Le desphenyl chloridazon présente, même plus de 10 ans après un dernier traitement des concentrations de l’ordre de 10.000 ng.L-1.  Pour une application plus ‘récente’ (5 ans), la concentration moyenne annuelle observée au cours des dernières périodes de lixiviation est double.

Le métabolite du metazachlore (metazachlore ESA) présente des concentrations moyennes annuelles de 100 à 1000 ng.L-1 lorsque le dernier traitement date d’une quinzaine d’années.

Le métabolite du metolachlore (metolachlore ESA) présente des concentrations moyennes annuelles entre 2000 et 10.000 ng.L-1 lorsqu’il est appliqué tous les deux ans. En cas d’usage moins régulier, la concentration est de l’ordre de 500 ng.L-1.  Pour des usages anciens (une quinzaine d’années), les concentrations moyennes annuelles n’excèdent pas 100 ng.L-1.

Sporadiquement, de la bentazone, du bixafen, de la clothianidine, du difenoconazole, de l’éthofumesate, du flufenacet, de l’epoxiconazole, du fluopyram, du fluxapyroxad, du mecoprop et du metamitron ont été quantifiés dans des échantillons d’eau pour générer une concentration moyenne annuelle de l’ordre de 5 à 30 ng.L-1.

Pour le volet du suivi dans les eaux souterraines, parmi les 58 matières actives suivies dans le cadre de cette étude, 31 ne sont pas suivies dans les eaux souterraines dans le cadre du monitoring organisé par le SPW.  Parmi celles-ci, il apparaît, vu les concentrations observées aux exutoires des lysimètres, qu’il serait opportun d’inclure le bixafen et le fluxapyroxad dans le suivi qualitatif des eaux souterraines.

Enfin, le rapport d’étude pose les bases d’un référentiel du devenir dans le sol (évolution de la concentration au cours des semaines, mois, années qui suivent l’apport et lixiviation éventuelle) des 58 matières actives suivies. 

Team