04 Février 2021

VIDEO : La plateforme maraîchage biologique du CRA-W

Développement d'une expérimentation en production de légumes, à travers quatre systèmes de culture distincts.

Première année de production

Cette plateforme existe depuis un an, il s'agit de la première année de production. Les cultures de légumes se trouvent dans un ensemble agroécologique plus vaste sur lequel est produit, notamment, de la biomasse végétale pour les cultures maraîchères. Telles que des cultures de luzerne, de miscanthus, de saule sous forme de taillis courte rotation.

Par ailleurs, il y a également des cultures fruitières, des haies d’espèces diversifiées, des zones fleuries, un rucher et deux étangs. Nous souhaitons, d’ici peu, intégrer également du petit élevage sur ce site qui fait au total un dizaine d’hectares.

Un secteur en pleine croissance

Ce secteur est en pleine croissance en Wallonie, il faut savoir que 83 % des légumes consommés en Wallonie sont importés. Ce qui montre bien le potentiel de développement existant. Le but de notre plateforme est évidemment de répondre aux questions et aux besoins des producteurs, que ce soit des agriculteurs qui veulent se diversifier vers le maraîchage ou que ce soit des maraîchers spécialisés en cultures de légumes. Pour cela, on a mis en place quatre systèmes de cultures contrastés comprenant des expérimentations de longue durée. C’est-à-dire qui s’échelonnent sur deux ou trois rotations de six ans. Ce qui va nous permettre d’étudier l’évolution de chaque système sur le long terme, que ce soit par rapport à la fertilité du sol ou à la productivité des cultures.

Faire cela en station a du sens parce que cela va permettre de maîtriser, de mesurer, d’enregistrer de façon précise et rigoureuse les paramètres de production. Ce qui est très compliqué à réaliser chez un producteur quand il s’agit d’expérimentations sur plusieurs années. On pourra également rester très innovants, anticiper des problématiques à venir et des contraintes importantes qui risquent de se poser d’ici quelques années. Par exemple, l’épuisement des ressources naturelles, la perte de biodiversité, la pollution de l’eau ainsi que les problématiques liées au changement climatique.

Même si les cultures de légumes sont des cultures à haute valeur ajoutée, ce sont aussi des cultures qui sont très intensives, exigeantes en fertilisants, en intrants et aussi en main d’œuvre.

Un processus de co-conception participative

C’est par un processus de co-conception participative associant des agriculteurs, des techniciens et des scientifiques que nous avons pu définir et construire ces différents systèmes. À priori, nous ne savons pas comment vont évoluer chacun de ces systèmes. Mais ce que nous avons voulu, c’est mettre en œuvre des pratiques culturales spécifiques pour chaque système afin de le rendre résilient et durable, à la fois sur le plan environnemental, économique et social. Cela a été possible grâce au fait qu’on ait cherché la meilleure rentabilité tout en essayant de minimiser au maximum l’impact sur l’environnement.

Quatre types de conduites

  • Le système 1 vise l’autofertilisation en misant sur les intercultures et l’introduction d’engrais verts dans la rotation.
  • Le système 2 vise aussi l’autofertilisation en misant sur les intercultures et des cultures de prairies temporaires pâturées par des animaux.
  • Le système 3 vise l’amélioration de la fertilité du sol, qu’elle soit physique, chimique ou biologique par l’apport de matière organique produite localement, par la réduction drastique du travail du sol et le zerophyto.
  • Le système 4 vise à fournir un témoin agriculture biologique type légume sur légume utilisant des fertilisants commerciaux et des biopesticides.

Les six cultures de chaque rotation sont présentes chaque année dans chacun des quatre systèmes. Chaque système est répété trois fois dans l’espace, ce qui conduit à 72 parcelles expérimentales arrangées selon un dispositif aléatoire complet. Nous avons à la fois des répétitions spatiales et temporelles. Ce dispositif nous permettra de suivre et d’étudier l’évolution de chaque système de culture sur des années météorologiques différentes.

Cultures mises en place

Au total, il y a huit espèces de légumes, deux espèces de céréales et différents mélanges d’espèces d’engrais verts qui sont cultivés chaque année sur la plateforme. Deux espèces de légumes sont communes à tous les systèmes de cultures. Les légumes qui sont cultivés cette année sur la plateforme sont : la courge, la carotte, les pommes de terre, les oignons, les betteraves rouges, le pois, le chou de Milan et la maïs doux. Il y a aussi les deux céréales : l’avoine et le blé, qui sont présentes chaque année pour l’alimentation humaine.

Pommes de terre

Ici, nous récoltons une culture de pommes de terre. Il y a deux variétés : Vitabella et Alouette, qui sont des variétés tolérantes au mildiou. Ces pommes de terre sont cultivées selon deux pratiques, soit avec le travail classique du sol (buttage, etc.), soit en non travail du sol et mulching de la culture. L’avantage du non travail du sol, c’est que l’habitat des mirco et des macro organismes du sol, tels que les vers de terre, sont respectés. Ce sont les vers de terre qui assurent cette porosité du sol et qui développent cette autofertilité du sol. Il faut aussi arriver à nourrir les vers de terre par les matières organiques qu’on applique régulièrement à la surface du sol. Ils intégrerons ensuite cette matière organique à l’intérieur du sol. En culture de pommes de terre, cela peut être assez compliqué parce qu’on est habitué à butter les pommes de terre. Ici, la méthodologie est modifiée pour les adapter au non travail du sol. C’est tout à fait exploratoire, mais c’est passionnant.

Oignons

Nous avons choisi aussi d’intégrer l’oignon dans la rotation, parce que c’est une culture qui est en demande croissante et qui est en majorité importée des Pays-Bas. On compare deux situations, avec ou sans mulching et avec ou sans travail du sol. Le mulching, cette année-ci, a plutôt été favorable étant donné qu’il a fait très sec. On a pu maintenir une humidité plus importante dans les parties mulchées. Ce qui est très important pour l’oignon puisqu’il est très exigeant à ce niveau-là.

Organisation des cultures

Nous avons choisi de travailler en planches permanentes d’1,5 m de large à plat afin de ne jamais tasser les planches elles-mêmes. Le tracteur va enjamber les planches et passera toujours, d’année en année, au même endroit. Ce qui permettra d’éviter le tassement, la compaction du sol et de préserver la vie du sol au niveau de la planche elle-même. Toutes les cultures sont organisées selon ce modèle-là.

Choux de Milan

Les choux sont assez sensibles à différents ravageurs tels que les lépidoptères, les mouches, les pucerons. Dans le système 3, on les a protégés avec des filets pour empêcher physiquement la possibilité de ces ravageurs d’atteindre le chou. Dans le système 4, on a plutôt utilisé des biopesticides pour lutter contre ces ravageurs.

Comment nos systèmes peuvent réduire les coûts de production et les impacts négatifs sur l'environnement ?

Le fait d’introduire des légumineuses, des engrais verts sous forme d’intercultures ou dans la rotation permettront évidemment de réduire les quantités de fertilisants organiques du commerce qui coûtent de plus en plus chers pour les producteurs. Le fait de réduire le travail du sol va permettre de diminuer le nombre de passages et d’utiliser des outils plus simples, ainsi on pourra réduire l’énergie fossile utilisée durant la saison. Le fait d’utiliser des mulchs de matières organiques qu’on laisse en surface du sol va permettre de diminuer les croissance d’adventices et aussi l’évaporation d’eau. Ce qui va nous permettre de diminuer évidemment l’eau d’irrigation et la quantité de travail pour le désherbage. Le fait de créer un sol vivant, bien structuré et poreux, non-compacté, va permettre aussi aux plantes d’être plus résilientes, plus robustes, plus tolérantes aux maladies et ravageurs. De ce fait, on devrait pouvoir réduire le nombre de traitements phytosanitaires.